Sharon Eyal - Delay the Sadness à La Villette
Delay the Sadness, le dernier spectacle de Sharon Eyal, est une poignante représentation de la douleur qui fait suite à la disparition d'un être cher. La pièce célèbre aussi la continuité de la vie et la résilience. À ne pas manquer à La Villette.
Delay the Sadness, la danse poignante de Sharon Eyal à La Villette
- Une fable chorégraphique sur la douleur et la résilience
- Une pièce hypnotique d'une intense sensibilité
- Le style de Sharon Eyal s'enrichit de pas classiques et de duos
- Portrait de Sharon Eyal, une chorégraphe renommée
Danser la douleur et son dépassement
Delay the Sadness (Retarder la tristesse) est une œuvre très personnelle de Sharon Eyal et son complice Gai Behar. Elle revêt une dimension intime puisqu’elle est dédiée à la mémoire de sa mère récemment décédée. Bien que l'œuvre ne soit pas strictement autobiographique, elle a été inspirée par l'esprit et la force de sa mère. Dans son langage chorégraphique tellement unique, Sharon Eyal sonde les émotions humaines et interroge notre capacité à les vivre, à les traverser, à les dépasser. Le titre lui-même est une promesse : la chorégraphe cherche à transformer sa peine personnelle en un récit universel sur le deuil, la mémoire et la continuité de la vie. Les huit danseurs de la Compagnie S-E-D (Sharon Eyal Dance) expriment dès l'ouverture une urgence palpable, une tension extrême, dans un flot chorégraphique ininterrompu. Une expérience sensorielle et émotionnelle totale.
Une pièce hypnotique d'une intense sensibilité
Les corps cambrés à l’extrême évoluent sur des demi-pointes avec des genoux pliés, dans une gestuelle à la fois retenue et saccadée. Les danseurs incarnent une humanité dénudée, traversée par des soubresauts et des spasmes corporels qui révèlent une sensibilité intense mise à nu. Ils portent, comme souvent dans les créations de Sharon Eyal, des costumes de « seconde peau » de couleur chair, striés de lignes rouges qui évoquent des veines ou la chair à vif, dans une esthétique sculpturale et vulnérable. Pour l'univers sonore, Josef Laimon a composé une partition musicale lancinante basée sur des boucles électroniques, des sonorités techno, et a intégré notamment des fragments du Funeral Canticle de John Tavener. Les lumières d’Alon Cohen jouent un rôle essentiel en soulignant l’esthétique mouvante et en créant un jeu d'apparitions et de disparitions qui invite à « danser avec ses propres spectres ». Delay the Sadness est une pièce hypnotique, où la beauté jaillit de l'instant, dans un moment sublime et suspendu qui permet de composer avec la tristesse.
"Mon cœur est dans mon ventre." Sharon Eyal
Le style de Sharon Eyal : danse organique et tendue, pas classiques et duos
La chorégraphe reste fidèle à sa danse organique et singulière basée sur une gestuelle tendue, des corps cambrés et une expressivité marquée des compositions de groupe. Dans ce spectacle, son vocabulaire s'enrichit de pas purement classiques (ports de bras, arabesques, sauts), ce qui apporte de l'ampleur et du contraste à ces contorsions. En outre, Sharon Eyal s’éloigne légèrement de ses chorégraphies de groupe ultra-synchronisées, souvent comparées à une nuée d’étourneaux, pour explorer des duos plus longs, intimes et ambigus. Ces duos, qui s'approprient et déforment le langage du ballet, sont d'une expressivité saisissante et rendent un hommage vibrant à la vie.
Portrait de Sharon Eyal, l'une des chorégraphes contemporaines les plus en vue
Après une longue carrière de danseuse et chorégraphe à la Batsheva Dance Company, Sharon Eyal fonde avec Gai Behar le L-E-V ("cœur" en hébreu). L'émotion pure et charnelle est en effet la base de ses créations qui laissent s'exprimer pulsions et sentiments dans un travail d'une extrême précision. Les danseurs s'approprient d'abord les mouvements inventés par la chorégraphe dans le détail, avant de laisser leur créativité lui ajouter une touche individuelle. Sharon Eyal et Gai Behar ont particulièrement marqué les esprits avec leur cycle de trois pièces consacré à l'amour, Love cycle (OCD Love, Love chapter 2 et The Brutal Journey of the Heart). Avec Into the Hairy (2024), Sharon Eyal et Gai Behar avaient continué l'exploration des sentiments et des émotions par une danse fluide, organique, hypnotique comme une transe sur fond de musique extatique. Sa compagnie, désormais nommée Sharon Eyal Dance (S-E-D), est basée en France depuis 2022.
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Sharon Eyal et Gai Behar chorégraphie
Avec Darren Devaney, Juan Gil, Alice Godfrey, Johnny McMillan, Keren Lurie Pardes, Nitzan Ressler, Héloïse Jocqueviel, Gregory Lau
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